Privatisation des radars embarqués : une manne pour l’Etat

Vendredi, le gouvernement a exposé son projet de déléguer la gestion des radars « mobiles-mobiles » à des sociétés privées, employant des chauffeurs particuliers. Cela n’a pas manqué de susciter de vives réactions. Mais concrètement, en quoi cela consiste ?

D’ici le mois de septembre 2017, cette mesure devrait être lancée. En riposte, l’association 40 millions d’automobilistes a dénoncé lundi une « excellente opération financière » pour l’Etat, qui engrangera près de 2,2 milliards d’euros de recettes rien qu’avec ce dispositif.

Le 2 octobre 2015, le gouvernement a dévoilé « l’externalisation du pilotage des voitures transportant les radars mobiles nouvelle génération », dont les entreprises privées seront responsables. Un appel d’offres a déjà été mis en œuvre, avant de lancer une expérimentation, déjà en cours en Normandie.

Une mesure déjà bien engagée

En effet, des voitures banalisées circulent incognito, sans verbaliser les conducteurs dépassant les limites de vitesse. Jusqu’à présent les 383 véhicules, ici des Peugeot 208, 308, Citroën Berlingo, Renault Mégane et consorts étaient conduites par des policiers ou des gendarmes en uniforme. Leur nombre devrait passer à 450. Hormis une boîte noire fixée sur la planche de bord, rien ne permet de détecter ces véhicules. Ils relèvent les infractions dans les deux sens de circulation, sans toutefois flasher. L’automobiliste ayant le pied un peu trop lourd sur la pédale d’accélérateur recevra sa contravention à son domicile.

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La Peugeot 208 est l’un des véhicules qui embarquent un radar mobile de nouvelle génération. Crédits: abcmoteur.fr

Cependant, la marge d’erreur de ces radars est plus élevée que celle de leurs homologues fixes, avec 10 km/h pour les vitesses inférieures à 100 km/h et 10% au-delà de 100 km/h, conte respectivement 5 km/h et 5% pour les autres. Seuls les grands excès de vitesse sont visés. On sera donc verbalisé à 146 km/h sur autoroute, à 124 km/h sur une voie rapide, à 102 km/h sur une nationale et à 61 km/h en ville.

Des évolutions notables

L’objectif est clairement affiché : optimiser au maximum le matériel qui se révèle « sous-utilisé », en moyenne une heure par jour, contre huit fois plus dans le cadre de la mesure. Ce, en vue de laisser les forces de l’ordre accomplir d’autres tâches.

« Ce nouveau dispositif doit inciter les conducteurs à respecter les limitations de vitesse, non pas seulement à l’approche d’un radar, mais de manière plus continue, dans le but de réduire la vitesse moyenne de circulation et donc le nombre de morts sur les routes ». Bruno Le Roux, ministre de l’Intérieur, le 7 février.

Ainsi, il devrait permettre de verbaliser dix fois plus qu’auparavant

Une fronde qui s’organise

Selon un sondage mené par Harris Interactive pour 40 millions d’automobilistes, 78 % des Français se montrent farouchement opposés à la privatisation des radars. 80 % d’entre eux pensent que le contrôle de la vitesse doit rester du ressort des forces de l’ordre.  L’association prédit aussi une hausse des PV et des retraits de points de permis. Mais elle craint également un excès de zèle généralisé, effet collatéral des privatisations.

Son président, Daniel Quéro, a déclaré dans les colonnes du Parisien que ces radars pourront dresser « plus de 38,5 millions de PV », à raison de 8 heures de circulation par jour. Dans Sud-Ouest, il parle d’une moyenne de trente flashs par jour. Une grosse manne en perspective pour l’Etat. D’ailleurs, une pétition a été lancée sur Internet, rassemblant près de 300000 signatures.

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Daniel Quéro, président de 40 Millions d’automobilistes. Crédits: 40 Millions d’automobilistes

Les autorités démentent ces données. Face aux 3,3 milliards de dépenses mobilisées par an pour la sécurité routière, cette recette semble bien « loin du compte », confirme Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la Sécurité Routière.

Enfin, pour prévenir tout risque d’erreur, les policiers signeront les PV, les prestataires privés n’auront pas accès au fichier des infractions routières, et les chauffeurs n’auront pas de quotas à respecter, selon Bruno Le Roux.

Voici un petit récapitulatif des évolutions des radars mobiles embarqués.

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Crédits: Alexandre Genest

A.G