Crèche de Noël : emblème religieux ou simple décoration festive ?

Les fêtes de fin d’année approchent à grands pas. A cette occasion, les décorations de Noël ont resurgi depuis quelques temps dans toutes les villes de France. Et chaque année, à cette époque, un débat resurgit également : Celui de la légalité des crèches de Noël installées dans certaines mairies.

La loi de 1905 consacrant la séparation de l’église et de l’Etat fêtait ce mois-ci ses 113 ans. Mais certains maires, attachés aux traditions, refusent encore d’appliquer un de ses principes : celui de la neutralité du service public. Ce dernier impose aux personnes publiques de veiller à la neutralité des services publics à l’égard des cultes.

Chaque année, à la même période, les tribunaux administratifs sont saisis de requêtes demandant l’interdiction des crèches de noël installées dans certaines mairies. Par un jugement rendu en 2016, le conseil d’Etat avait décidé que « dans l’enceinte des bâtiments publics, sièges d’une collectivité publique ou d’un service public, l’installation d’une crèche par une personne publique n’est en principe pas conforme au principe de neutralité, sauf si des circonstances particulières permettent de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif. »

Défendre la laïcité

Le cas le plus connu (et redondant) relatif à cette question est celui du maire de Béziers, Robert Ménard. Au nom des « racines chrétiennes de la France », celui-ci installe chaque année une crèche devant l’Hôtel de Ville de Béziers. Un « acte de résistance », selon lui. Cette année encore, la justice administrative s’en est emparé. Et comme à l’issue du précédent jugement, le tribunal administratif de Montpellier a imposé, ce jeudi 13 décembre, à Robert Ménard de retirer sa crèche.

Rien, selon le juge administratif, ne permet de reconnaître à cette installation un caractère culturel, festif ou artistique. Il a été jugé qu’en l’espèce, cette crèche avait pour seul et unique but de marquer une préférence religieuse, ce qui va à l’encontre du principe de laïcité. Robert Ménard, ayant sans doute prévu ce verdict, avait pris soin cette année d’installer sa crèche sur des roulettes. Il a donc simplement déplacé de quelques mètres son installation.

Evaluer le caractère profane ou religieux

Mais comment peut-on savoir si l’installation d’une crèche constitue purement et simplement un acte de revendication religieuse ?

Peut-on considérer qu’une crèche, symbole traditionnel chrétien, puisse être vue comme un simple élément de décoration accompagnant les fêtes de Noël ?

Certains s’accordent à dire que la crèche de Noël n’est ni un symbole purement religieux, ni un objet tout à fait profane. Celle-ci a un caractère mixte.

Nombreux sont les français installant, à l’approche des fêtes de noël, le bœuf, l’âne et le petit Jesus près de leur sapin vert. Non pas tellement pour célébrer la naissance du Christ, mais plutôt car ils voient en la crèche une décoration s’accordant avec l’esprit de Noël en tant que fête païenne. L’installation de la crèche est, dans l’esprit de certains, devenue une tradition plutôt culturelle que religieuse. Lorsqu’il s’agit d’une telle installation au sein d’un établissement public, le juge doit tenir compte du contexte dans lequel a eu lieu l’installation. Il s’agit d’évaluer la motivation derrière celle-ci. Concernant le cas de l’hôtel de ville de Béziers, il apparaît clairement que l’installation de Robert Ménard avait pour principal but de revendiquer une foi chrétienne. Mais d’autres cas sont moins évidents. Il est parfois difficile de déterminer si l’on est, ou non, face à une simple décoration dénuée de connotation religieuse.

On se trouve ainsi dans une « zone grise » du droit : L’installation d’une crèche au sein d’un établissement public n’est ni réellement prohibée, ni vraiment autorisée. Le débat risque donc bien de refaire surface l’année prochaine, encore.

Rachel Cotte