Charline Delporte se bat pour la survie de la Miviludes

Charline Delporte est la présidente du Centre national d’accompagnement familial face à l’emprise sectaire (le CAFFES) basé à Lille. Le 22 novembre dernier elle dépose au chef de cabinet du préfet de la région Hauts-de-France une lettre de demande d’audience au président de la République. Objectif : remettre au président la pétition “Sauvons la MIVILUDES”. Signée par 5 020 personnes, sa lettre au président de la République est restée pour le moment sans réponse.

delporte devant la préfecture
Charline Delporte devant la Préfecture de Lille le 22 novembre 2019 @Photo CAFFES

La Miviludes c’est la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Le 1er octobre 2019, France Inter affirme en exclusivité que le gouvernement souhaite rattacher la Miviludes au ministère de l’Intérieur et plus précisément au Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) à partir du 1er janvier 2020. 

Les associations sont sous le choc. Elles redoutent que la question des dérives sectaires soit réduite à la seule problématique de la radicalisation djihadiste.

Une dissolution qui interpelle

La Miviludes a été créée en 2002. Composée d’une quinzaine de personnes, elle était chargée d’observer et d’analyser les mouvements sectaires, et de mettre en garde le public, notamment au travers d’un rapport annuel. Cette structure est unique au monde, son budget inférieur à 500 000 euros est en baisse constante, il représente une goutte d’eau dans le budget de l’État. Mais alors pourquoi vouloir fragiliser la Miviludes ?

Selon Charline Delporte « La lutte contre les dérives sectaires n’est plus très importante aux yeux du gouvernement. (…) Depuis 2012, les attentats ont déplacé le curseur vers l’islamisme, et nous sommes passés au second plan. » 

Elle constate également un désintéressement du gouvernement actuel. Chaque année, le ministre de l’Intérieur adressait une circulaire aux préfets afin que ceux-ci organisent des réunions avec les principaux acteurs de l’action anti-sectes. « Castaner a rompu avec cette pratique », constate Charline Delporte, qui s’étonne également de n’avoir jamais été reçue par les services de la présidence, alors que tous les prédécesseurs d’Emmanuel Macron, depuis François Mitterrand, tenaient à examiner son travail. 

Le gouvernement de son côté nie tout désintérêt : « Le gouvernement confirme l’importance accordée à la prévention et à la lutte contre les dérives sectaires. Rattachée au ministère de l’Intérieur, la Miviludes pourra exercer ses missions en pleine articulation avec le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation. »

Charline Delporte n’est pas la seule à livrer ce combat.

La mobilisation pour sauver la Miviludes grandit au fil des jours. Le 27 novembre 2019, après avoir étudié le projet de loi de finances 2020, le Sénat émettait un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » inscrits à ce projet. (http://www.senat.fr/rap/a19-146-1/a19-146-15.html)

Le Sénat a publié également un rapport mentionnant des choix contestables, notamment celui envisagé pour la Miviludes. (http://www.senat.fr/rap/a19-146-10/a19-146-105.html)

Depuis bientôt un an, de nombreux députés et sénateurs se mobilisent autour du devenir de la Miviludes, posant des questions écrites ou orales au gouvernement, partageant l’inquiétude des associations de terrain. 

Maude Petit-Jové