Les zoos protègent-ils vraiment les animaux ?

Cette année le zoo de Lille fête ses 70 ans d’existence. Alors que jeudi 8 septembre une proposition de loi sur la condition animale était débattue à l’Assemblée nationale, il est important de se questionner sur le rôle des zoos dans la protection des animaux. N’ayant eu aucune réponse du zoo de Lille, il a tout de même été possible de discuter avec le Dr Sophie Wyseur, vétérinaire et vice-présidente de l’association Code Animal.

A l’entrée du zoo on est accueilli par cette rangée d’enclos. Crédit : Margaux Chauvineau

Pourquoi est ce qu’aller au zoo est-il si mal vu ? Le zoo de Lille se donne pourtant pour mission de « sensibiliser le public au respect de l’environnement ». A sa création en 1950, le zoo de Lille ne présentait que des animaux dits « domestiques » du pays, comme des ânes, des poules ou des chèvres. C’est dans les années 60 que le parc zoologique va recevoir par des particuliers des espèces tropicales telles des singes, des dromadaires ou bien des reptiles. Chaque année des rénovations sont faites pour agrandir le parc et recevoir plus d’espèces pour être aujourd’hui le site touristique le plus visité de la ville.

Le manul, aussi appelé chat de Pallas, dans son enclos. Crédit : Margaux Chauvineau

Protéger et conserver les espèces ?

On peut lire sur le site que « le bien-être des animaux présents est une priorité absolue pour l’ensemble des équipes du zoo, qui s’adaptent aux conditions de vie de chaque animal afin de leur offrir un espace aménagé et stimulant ». Les espèces sont réparties en six zones sur trois hectares. On peut y retrouver notamment des îlots artificiels avec de la végétation pour les gibbons. Pour Sophie Wyseur, ces promesses de protection et de conservation des animaux ne sont qu’une façade. Bien que ces zoos fassent partie de programmes de protection ou de sensibilisation à la cause animale comme l’EAZA (Association Européenne des Zoos et Aquariums), leur mission première est de divertir le public. Aussi, ils n’ont « pas de grille d’obligations budgétaires, de pourcentages à mettre dans le conservation », ce qui ne pousse pas les zoos à faire des réinsertions dans les milieux naturels. Même le côté éducatif des zoos semble anodin au Dr Wyseur puisqu’aucune étude à grande échelle n’a eu de résultats probants en la matière : « les gens ne regardent pas les pancartes, ne savent pas le nom des animaux ».

« Il faut savoir ce que deviennent les animaux dont on ne sait pas quoi faire parce qu’on a eu trop de naissances sur certaines espèces et qu’on ne peut pas les échanger entre zoos, ça s’appelle du surplus. Ils sont euthanasiés. »

Le zoo possède environ 450 animaux, mais on ne connait pas exactement le nombre d’espèces menacées. Cette « collection animale », comme décrite sur leur site, est constituée d’espèces « nées en captivités, ou issues de sauvetage ou de saisies de douanes ». Il y a donc une reconstruction superficielle des habitats d’origine de ces animaux qui n’ont jamais connu que la captivité. Le but des zoos c’est aussi de faire des naissances et de repeupler les espèces. « Il faut savoir ce que deviennent les animaux dont on ne sait pas quoi faire parce qu’on a eu trop de naissances sur certaines espèces et qu’on ne peut pas les échanger entre zoos, ça s’appelle du surplus. Ils sont euthanasiés », nous indique-t-elle.

Les rhinocéros blancs, espèces menacées, dans leur enclos, d’où l’on entend les bruits des voitures. Crédit : Margaux Chauvineau

« Il faut changer l’esprit des gens »

Il existe cependant des solutions pour la protection des espèces. Pour Sophie Wyseur, il faut développer les sanctuaires et les refuges et faire de la conservation in situ avec l’aide des populations locales. Cette envie d’exotisme par les populations occidentales qui ne peuvent voir des tigres, des éléphants ou bien des girafes dans leur continent, c’est la source du problème. « Il faut changer l’esprit des gens. Dans notre pays, il y a une belle faune, est ce qu’on ne peut pas essayer de la préserver ? »

Pour elle, « c’est plus intéressant de voir un animal à la télé plutôt que de voir un animal qui tourne en rond dans un enclos qui même s’il est grand sera toujours trop petit pour lui ». Ces animaux qui parcourent des vingtaines de kilomètres chaque jour dans leur habitat naturel sont réduits à des enclos de taille dix fois inférieure à ce qu’ils devraient avoir. Ils développent des stéréotypies, des mouvements répétitifs, sans but, s’apparentant à de la folie. Sophie Wyseur explique que c’est « inconscient, comme des tocs, montrant un ennui profond, une frustration, une impossibilité d’exprimer des besoins physiologiques de base ».

Alors oui, voir des tigres en vrai, c’est excitant, mais n’est-ce pas tout aussi bien de les voir épanouis et protégés dans la nature ? Allez regarder le documentaire Notre Planète, disponible sur Netflix, on est sûrs que c’est tout aussi magnifique de les voir à travers un écran.

Margaux Chauvineau

Vidéo de sensibilisation sur la chaîne Youtube Code Animal
Bande annonce de Notre Planète, documentaire Netflix.