Et si les vagues bretonnes avaient le pouvoir de faire oublier, le temps d’une journée, COVID, attentats, Trump et compagnie ? Pari tenu aux côté du capitaine Pierre, sur le monoque Roméo. La journée s’annonce salée…
7h30

Le réveil est dur, mais déjà, Pierre, notre capitaine, examine avec attention les conditions météos. Il faut dire que le temps est capricieux en Bretagne. Naviguer requiert une prudence particulière, surtout lorsqu’on est responsable de tout un équipage. Heureusement, l’ingénieur naval n’en est pas à son premier coup d’essai. Une seule sortie, à l’âge de sept ans, lui aura suffit pour devenir un mordu de voile. « Les règles sur la Mer ne sont pas les mêmes que sur la Terre » déclare Pierre, entre deux gorgées de thé. « On ne sait pas toujours où l’on va dormir, on ne peut jamais tout planifier à l’avance, mais c’est une vraie liberté.» ajoute-t-il. Difficile de ne pas rêver du prochain petit déjeuner, qui se fera au milieu des eaux, près de l’Ile de Houat.
8h30

C’est l’heure de récupérer les marins d’eaux douces qui nous attendaient de pieds fermes à Lorient, bien décidés à quitter la pollution citadine pour rejoindre l’air pur et entendre chanter les mouettes. Les cinq apprentis n’ont jamais posé les pieds sur un bateau, et les questions fusent: « Y-a-t-il des toilettes à bord? »; « Que fait-on si l’on tombe à l’eau ? »; « Combien de mètres fait le bateau? »; « Que faire si j’ai le mal de mer? »… Grand pédagogue, Pierre répond patiemment à chacune des questions. Un sourire en coin, il garde tout de même une surprise pour l’arrivée au Port de la Trinité-sur-Mer…
10h

Après quelques courses de passage (six bouches à nourrir quand même!), l’équipage est accueilli au port par une délicieuse odeur de crêpe au sarrasin, de la musique, et des rangées de stands sur lesquels partout il est possible de lire « SPI OUEST ». Satisfait de l’effet que cet évènement produit parmi ses matelots, Pierre explique qu’une course entre voiliers, appelée régate, est prévue le jour même. « Il y aura du monde sur l’eau certes, mais l’arc-en-ciel de voiles qui nous attend en vaut la peine. »
11h

Pendant que le commandant de bord procède au « checking » du bateau (vérification du matériel), petite promenade sur le quai du port pour admirer les catamarans et goûter le fameux kouign- amann, une spécialité bretonne agréablement chargée en beurre et en sucre. De retour au bateau, une mauvaise surprise les attend pourtant… Apparemment, des bateaux de pêche manifestent à la sortie du port. Ils revendiquent une meilleure reconnaissance de la pêche traditionnelle. Le passage bloqué, aucun bateau ne peut sortir, pas même ceux du SPI OUEST…
12h

Un responsable du port nous annonce que les pêcheurs sont en train de partir! Gros soulagement de l’équipage qui avait tout de même fait bien de la route pour seulement deux petits jours en mer. Roméo n’est pas le seul à quitter le port… tous les skippers de la course sortent les voiles, rejoignant le large… Flottant parmi les coques et les voiles colorées, la scène est à couper le souffle… Pierre reste néanmoins très concentré. Il ne s’agirait pas de cogner l’un des bateaux.
13h

C’est décidé, il est temps de hisser la voile. Le capitaine assigne un rôle à chaque membre de l’équipage qui se prête au jeu avec enthousiasme. Tandis, que Sebastian s’occupe de barrer, Manon ouvre les taquets et tire sur les haussières. La grand voile prend la forme du vent, puis c’est le tour du génois (la plus petite voile, à l’avant), et Roméo prend de la vitesse, et fend les vagues. Cap vers l’Ile de Houat, les voiliers de la SPI se fondent progressivement dans l’horizon.
15h

Après deux bonnes heures de navigation, la faim se fait ressentir à bord. L’heure est à la cuisine, et tout le monde s’y colle. Au menu: salade de thon, avocats, tomates, mozzarella, sardines… Espérons que ça suffira avant le dîner de ce soir, car l’escapade sur l’Ile de Houat s’annonce sportive et le vent commence à souffler.
16h

Deux aller-retours à bord de la petite annexe sont nécessaires pour débarquer l’équipage sur la charmante île de Houat. Pierre rouspète contre le matériel: « C’est pas normal d’avoir un moteur si petit. C’est toujours compliqué d’aller sur terre dans ces conditions. ». Heureusement, le trajet jusqu’au port se fait sans trop de soucis. Les moussaillons peuvent enfin profiter du paysage que leur offre la petite île composée de quelques centaines d’habitants à l’année seulement. Depuis un chemin, ils pourront admirer leur beau Roméo, flottant fièrement sur l’eau.
18h

Il ne s’agirait pas de traîner sur l’île. L’idée de Pierre, c’est de mouiller du côté abrité de l’Ile, afin d’y dormir sans être trop secoué. Mais visiblement, nous ne sommes pas les seuls à avoir eu l’idée, puisqu’ont déjà mis l’ancre plusieurs autres voiliers. Une fois le bateau immobilisé, Marine sort les bières. L’heure de l’apéro a sonné, en même temps qu’un magnifique coucher de soleil…
19h

Retour au fourneaux. Pas question de remettre un pied à terre sans avoir goûté aux merveilleuses crêpes bretonnes, réalisées à partir de farine de sarrasin. Une bouteille de rouge est déjà sortie pour accompagner les galettes. Les marins qui terminent leur assiette en cabine sans en laisser une miette.
20h

Pour terminer la soirée sur une bonne note, Manon sort un jeu de cartes. Les rires sont étouffés par les bruits des vagues qui frappent la coque et le cliquetis du mat. La journée a été longue et le sommeil s’empare progressivement de l’équipage. Ca sera la première nuit à bord d’un bateau pour certains, mais pas pour Pierre, qui garde un oeil ouvert en cas d’imprévus. On ne sait jamais…
Emilie Cordier
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