Les animaux comme le vison, dommage collatéral du coronavirus

Après les pangolins et les chauves-souris, c’est au tour du vison d’être pointé du doigt. Les autorités sanitaires du Danemark ont constaté une mutation du SARS-CoV-2 chez ces petits mammifères qui ont contaminé au moins 12 personnes. La décision a été sans appel : la totalité des visons danois vont être abattus dans les prochains jours.

Au printemps, déjà, des visons contaminés avaient été observés dans le pays. Selon les scientifiques, le virus muté touchant le vison ne réagit pas autant aux anticorps que le virus normal. Il y a donc un risque que le vaccin, lorsqu’il sera mis au point, ne fonctionne pas.

La Première ministre sociale-démocrate Mette Fredeiksen a déclaré que le pays avait une « grande responsabilité » envers ses citoyens mais aussi « une responsabilité encore plus grande à l’égard du reste du monde« . Si cette mutation reste mal connue, les scientifiques s’accordent sur le fait que le virus ait été transmis par l’Homme.

Les visons sont enfermés dans des cages allant de 60cm² à 1m² (Henning Bagger/Ritzau Scanpix/AFP)

Face à ce nouveau type de contamination, le Danemark a appelé les sept municipalités du Jutland du Nord à la plus grande prudence. 280 000 personnes sont ainsi priées de limiter leurs déplacements et de rester chez elles, le plus possible.

Dans un communiqué du 5 novembre, l’Académie nationale de médecine et l’Académie vétérinaire de France « approuvent la décision du gouvernement danois« . Pour autant, cette décision ne fait pas l’unanimité au sein de la communauté scientifique. François Balloux, professeur à l’University College de Londres, a tweeté « Il y a des milliers de mutations du Sars-Cov-2 qui apparaissent constamment. Le fait que quelques-unes aient été observées chez les visons ne changera pas les souches en circulation chez l’homme. Si elles favorisaient la transmission du virus vers l’homme, [ces souches]auraient déjà une haute fréquence ».

Cette décision concerne quelques 17 millions de visons. Le Danemark est le premier producteur mondial de fourrures et le secteur regroupe plus de 6 000 emplois. Cet abattage de masse représente un coût estimé à 670 millions d’euros. L’Association danoise de la protection animale estime que « le moment est idéal pour en finir définitivement avec l’élevage de visons« .

Et si le pangolin avait été accusé à tort ?

Dès le début de l’épidémie, le petit mammifère a été désigné comme l’hôte intermédiaire entre la chauve-souris rhinolophe et l’Homme. Présumé coupable suite à une étude indiquant que les génomes du virus sur les pangolins étaient identiques à 99% sur ceux patients atteints du Covid-19, il n’en est finalement rien. Le génome n’est similaire qu’à 89% selon les dernières recherches.

La communauté scientifique fait donc marche arrière. « Les similitudes entre le virus infectant le pangolin et le Sars-CoV-2 qui touche les humains ne concernent qu’un tout petit domaine nécessaire à l’entrée du virus dans nos cellules » explique Etienne Decroly dans une étude, microbiologiste et directeur de recherche au CNRS.

Le pangolin est le seul mammifère à être doté d’écailles (Roslan Rahman / AFP)

Si la chauve-souris a bien été identifiée comme l’hôte naturelle du virus, l’hôte intermédiaire n’est pas encore connu. Beaucoup de mammifères étaient vendus vivants sur les marchés chinois à côté du pangolin, la liste des suspects est donc longue.

Pour autant, les associations et appellent et rappellent à la plus grande vigilance. Nombreuses ont été celles qui ont dénoncé les chasses à répétition envers les chauves-souris rhinolophe et les pangolins. Ces derniers étant en voie d’extinction, ils sont une espèce protégée. Pour autant, ils restent l’animal le plus braconné au monde. Ses écailles sont particulièrement recherchées en Asie pour la médecine traditionnelle.

Si cette pandémie sera riche de leçons dans les décennies à venir pour les générations futures, peut-être que la première d’entre elle pourrait être celle qu’une proximité trop grande avec des animaux sauvages par nature, est nocive, pour l’Homme, mais avant tout et surtout pour eux.

Flore Lheureux


Image mise en avant : un éleveur danois dans sa ferme (MADS CLAUS RASMUSSEN/ AP)