Allô Démocratie ? c’est pour un signalement, la loi sécurité globale est passée

A l’origine, la loi sécurité globale était une loi technique sur la police municipale et la sécurité privée, elle a été enrichie des demandes corporatistes des syndicats de police. L’ancien ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, n’avait pas osé donner suite à ces demandes, Gérald Darmanin l’a fait.

Déposée le 14 janvier 2020, la proposition de loi sécurité globale évolue suite à des entretiens organisés à partir du 20 juillet entre le ministre de l’Intérieur et les syndicats de police. Une nouvelle version est enregistrée le 20 octobre, petite nouveauté l’article 24 :

« I. – Le paragraphe 3 du chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est complété par un article 35 quinquies ainsi rédigé :

« Art. 35 quinquies. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification d’un agent de la police nationale ou de la gendarmerie nationale autre que son numéro d’identification individuel lorsqu’il agit dans le cadre d’une opération de police. »

II. – L’article 35 quinquies de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne fait pas obstacle à la communication aux autorités administratives et judiciaires compétentes, dans le cadre des procédures qu’elles diligentent, d’images et éléments d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale. »

Une semaine avant, le 13 octobre, au cours d’une réunion avec l’ensemble des syndicats de police, Gérald Darmanin l’avait d’ailleurs annoncé en ces termes : « Soyez rassurés, avec le président de la République et le Premier ministre, nous serons toujours là pour vous défendre. Le travail se poursuit sur des réformes annoncées en septembre : floutage, nouvelle utilisation des caméras-piétons. Ils trouveront leur traduction dans la prochaine proposition de loi Fauvergue-Thourot*. » » explique Pascale Pascariello dans Médiapart.

Gérald Darmanin tient promesse, le vendredi 20 novembre la loi est adoptée en première lecture, y compris l’article 24 tant décrié, mais avec une modification de dernière minute pour calmer les tensions :

I. – Le paragraphe 3 du chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est complété par un article 35 quinquies ainsi rédigé :

« Art. 35 quinquies. – Sans préjudice du droit d’informer, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification, autre que son numéro d’identification individuel, d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de police municipale, lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police.

II. – Les dispositions de l’article 35 quinquies de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne font pas obstacle à la communication, aux autorités administratives et judiciaires compétentes, dans le cadre des procédures qu’elles diligentent, d’images et éléments d’identification d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de police municipale. »

Une question se pose, pourquoi voter cette loi en procédure accélérée alors qu’aucun impératif n’exige son application dans l’immédiateté ? C’est ce que dénonce Amnesty international le 12 novembre : « Nous déplorons que cette proposition de loi soit examinée en procédure accélérée, alors qu’aucune urgence ne justifie ce choix. […] Cette procédure restreint de facto leur examen approfondi et l’information éclairée de la société. Nous regrettons que ce texte ne fasse pas exception à la règle. »

*Les deux députés LREM qui ont portés la loi sécurité globale sont Jean-Michel Fauvergue, ancien patron du RAID et Alice Thourot, avocate.