Le sport féminin en quête perpétuelle de reconnaissance

« Sport féminin toujours ». Il ne s’agit pas du titre d’un film mais bien celui d’une campagne lancée par le CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel). Depuis 2014, la troisième semaine du mois de janvier est consacrée au sport féminin et à sa médiatisation. Son objectif est d’offrir plus de visibilité aux sportives et de « casser les préjugés. »

Le sport féminin ne représente que 18% des retransmissions sportives sur nos écrans. La barre des 20% devait être franchie en 2020 mais la Covid-19 en a décidé autrement. Pourquoi un tel écart entre hommes et femmes ? Historiquement, le sport est considéré comme un domaine réservé aux hommes. Tout le monde a déjà entendu parler de Pierre de Coubertin, ce baron qui a œuvré pour réintroduire les Jeux Olympiques à partir de 1896. Mais le nom d’Alice Milliat est inconnu pour un grand nombre de personnes. C’est pourtant grâce à elle que les athlètes féminines sont présentes aux JO. Elle a fondé la Fédération des sociétés féminines sportives de France et a milité pour la reconnaissance du sport féminin au niveau international.

Le reste de l’année, on continuera à voir très peu de sport féminin

Nicolas Delorme, sociologue du sport, explique dans les colonnes de Ouest-France : « L’opération met les projecteurs sur le manque de médiatisation du sport féminin pendant une semaine, mais le souci, c’est que les 51 autres semaines, on continuera à en voir très peu. » Selon lui, il faudrait une « médiatisation récurrente » pour faire évoluer les choses. Il est également septique quant à la réelle augmentation du nombre de téléspectateurs : « Il y a certes une amélioration mais on part de très bas… Le fait que le football, le rugby et le handball aient des résultats, à très haut niveau, a entraîné un peu plus de visibilité. Il y a eu de bonnes audiences mais beaucoup sur la TNT ou les chaînes « bis » de grands médias, comme lors du championnat d’Europe de handball sur TMC et pas TF1. Avant la finale, ça n’intéresse pas les chaînes majeures. »

Une prise de conscience de la part des diffuseurs et des téléspectateurs

Pour Carole Gomez, chercheuse en géopolitique du sport à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques), il y a une vraie prise de conscience de la part des médias. « Tout comme les sponsors, les médias cherchent à développer de nouveaux marchés. Le réservoir consommateur pour le sport masculin a peut-être atteint son plafond. » Le sport féminin devient un « nouveau produit » et une approche marketing ne peut qu’être que bénéfique.

D’après une enquête réalisée par RTL, les chiffres sont plutôt positifs et encourageants : 54% des Français et 72% des amateurs de sport souhaitent en voir davantage à la télévision et à la radio. Le grand public aimerait également à 62% une plus grande féminisation des journalistes.

Enquête réalisée par RTL sur « le regard des Françaises et Français sur le sport féminin »

Roxana Maracineanu très engagée pour la cause féminine

Ministre des sports depuis 2018, l’ancienne nageuse française se dit « ravie » qu’il y ait encore du travail sur la question du sport féminin. « J’étais déjà engagée dans le milieu associatif avant d’être ministre. » Issue d’une sport où la mixité règne, la ministre des sports s’est rendue compte du chemin à accomplir une fois sa carrière terminée. « J’ai ressenti une difficulté sur la féminisation de l’encadrement, des entraîneurs, des adultes qui entourent les athlètes, où les femmes sont trop peu nombreuses. On travaille déjà sur cet axe, comme sur le renouvellement des instances, et la notion d’engagement de ces athlètes une fois leur carrière terminée dans la vie associative et fédérale, les métiers du sport en général. » Interviewée par France TV Sport, Roxana Maracineanu est également revenue sur les conséquences de la crise sanitaire sur le sport féminin. « Ce dernier a été tout particulièrement impacté par cette crise, alors même que son modèle économique était déjà fragile. C’est pour ça que des dispositifs majeurs d’aides ont été mis en place auxquels nous avons évidemment inclus le sport féminin. »

Roxana Maracineanu, ministre des Sports
Crédits : France TV Sport

Les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 à Paris représentent également un enjeu important pour le sport féminin. Le Comité d’Organisation a d’ores et déjà annoncé que 50% des athlètes et para-athlètes seront féminins. De plus, chaque fédération avance de son côté et construit petit à petit un espoir de stabilité pour le sport féminin. Les cyclistes françaises évoluant dans une équipe professionnelle étrangère ont depuis le 15 janvier acquis le statut de sportives professionnelles. De quoi redonner espoir à de nombreuses jeunes filles qui rêvent de devenir sportives de haut niveau.

Amélie Desjuzeur