Disney et Canal+, l’alliance irréductible passée entre la famille Bolloré et Mickey

Parmi les plus grands groupes audiovisuels mondiaux, Disney figure incontestablement comme l’un des plus importants. De l’autre côté de l’Atlantique en Europe, le groupe Canal+ ressort lui-même comme un puissant réseau français : l’alliance était naturelle. Elle passe désormais par un nouveau partenariat basé sur le streaming.

L’affaire pourtant débutait mal. Lorsqu’en 2019 l’énorme groupe américain dépose son nom Disney +, un conflit éclate avec la filiale de Vivendi, le célèbre Canal+. En cause, l’usage du petit sigle positif qui est reconnu comme la marque distinctive du réseau de médias français placé précisément sur le même secteur, celui de l’industrie audiovisuelle. 

L’histoire ne tardera pas à se résoudre. Ce n’est donc ni un procès au long cours qui débute, ni une amende faramineuse versée, mais plutôt un accord extraordinaire de plusieurs centaines de millions d’euros qui est trouvé. Au combat fratricide entre deux anciens alliés, il est préféré le début d’une nouvelle alliance singulière qui prend forme… Business is business. 

Tandis que le groupe Canal+ disposait déjà d’un bouquet de streaming florissant, mettant à la disposition de ses utilisateurs tant Netflix qu’OCS détenu au tiers par le groupe, l’offre vient s’enrichir du service vidéo de la Walt Disney Compagny, Disney +. 

Mais cela va plus loin. Le coûteux accord garantit à Canal+ l’exclusivité des droits de la plateforme à la télévision française, soit simplement le fait que les opérateurs devront souscrire un contrat avec la filiale de Vivendi s’ils veulent proposer le service sur leurs propres boxes. En outre, la chaîne Canal+ conserve la diffusion en première exclusivité des films du groupe en France. Et cela ne concerne pas seulement les films de Disney, mais ceux de l’ensemble du groupe, qui y ajoute donc Pixar, Marvel, Lucasfilm et 20th Century Fox

Le petit écran de son côté est servi par les nombreuses chaînes dont dispose le groupe américain sur sol français, comme Disney Channel et Disney Junior, mais également National Geographic

Aussi une telle alliance ne peut être que nécessairement profitable aux deux entreprises. Tandis que Maxime Saada, patron de Canal+, estime que cela aidera son groupe dans son objectif « de devenir la marque de référence », Kevin Mayer, directeur de la division « Direct-to-consumer & International » de Disney confie aux Echos que « c’est via notre partenariat avec Canal+ que nous toucherons le plus de monde ».

Deux géants séparés par l’Atlantique, Canal+ et Disney + sont désormais tant reliés par des contrats que par le sigle adjoint à leur fin. Source : Numerama.com

Histoire d’un long partenariat

Mais le choix du groupe Vivendi parmi les autres existant de l’Hexagone n’est pas le fait d’un hasard. Dès les années 80, les films Disney étaient vendus en exclusivité en France à la chaîne cryptée naissante de l’époque, Canal Plus. La naissance de la vidéo à la demande dans les années 2000 marque elle aussi un nouveau partenariat entre les deux groupes par l’ajout de Disney Cinemagic à l’offre de Canalsat. Aussi, il était naturel que, dès 2015, Disney renoue son offre télévisuelle avec un système de chaînes qui ne se retrouve qu’à travers l’offre de Canal+. Disney Junior, Disney XD et Disney Cinema, autant de contenu qui ne fut partagé aux autres opérateurs qu’après négociations avec l’entreprise de Vincent Bolloré.

Et si les deux groupes se font face lorsqu’il s’agit de production cinématographique, entre les StudioCanal et les nombreux studios détenus par Disney, la distribution du contenu continue quant à elle de réunir ces deux géants rois de l’écran. 

Tout pourrait donc porter à croire que Canal+ se détourne progressivement de la télévision traditionnelle, ce qui n’est pas le cas selon Maxime Saada, président du directoire de Canal+, pour qui le sport notamment reste « un rempart ». 

Toutefois, le fait que MyCanal, l’offre digitale, représente 40% de la consommation des contenus du groupe est révélatrice d’un nouveau rapport du public aux films et aux séries. De plus en plus, il retrouve son contenu non plus sur une télévision, mais sur des écrans mobiles par les tablettes, ordinateurs et smartphones. 

En cela, l’alliance n’est pas signée selon une peur du passé qui pousserait deux géants à s’unir effrayés à l’idée de tomber mais, plutôt, un même regard plein d’ambition sur toutes les possibilités offertes par le lendemain.

Foucault Barret