Lee Miller, la muse surréaliste devenue reporter de guerre

De la couverture de Vogue au camp de concentration de Dachau, l’histoire de Lee Miller c’est le récit d’une femme qui a pris partie de son expérience de mannequin pour s’accomplir comme reporter de guerre sur le front de la Seconde Guerre Mondiale. 

Source : normandie-victory-museum.fr

Dans l’effervescence des rues new-yorkaises s’est joué le destin de Lee. Manquant de se faire renverser par une voiture, un homme, Condé Nast, la rattrape par le bras. Il est l’éditeur du magazine Vogue. Séduit par sa beauté, il fait d’elle l’un des visages du journal en la faisant apparaître en couverture puis dans les différents numéros. Ce que les photographes aiment chez elle, c’est sa beauté froide et la façon qu’elle a de garder une certaine distance avec l’appareil. Une distance que l’on comprend aisément si l’on s’intéresse à son histoire.

Fille d’un photographe amateur, elle est mise très jeune sous le feu des flashs. Des flashs utilisés au péril de son intimité puisque ce père la prend en photo nue alors même qu’elle est adolescente. Traumatisme qui vient s’ajouter au viol qu’elle a subi lorsqu’elle avait sept ans. En réalité, ce que souhaite la jeune mannequin c’est reprendre la main sur l’appareil photo qui l’enchaîne au statut de femme objet et devenir à son tour, photographe.

Lee Miller avec une boule de cristal, Paris, France, 1932 / George Hoyningen-Huene

Son idylle avec Man Ray

Déterminée, elle s’envole pour Paris à la recherche de l’un des plus grands de son époque Man Ray. Elle le convainc de la prendre comme élève, devient sa muse, son amante, sa partenaire. Ensemble, ils développent le surréalisme en photographie et découvrent par hasard le procédé de solarisation. Aux côtés de cet artiste qu’elle admire, Lee se perfectionne et trouve sa propre identité artistique et publie ses premières photos pour Vogue. Si la relation est artistiquement inspirante, elle est aussi très passionnelle. Man ne supporte pas les infidélités de Lee Miller. Ils se séparent en 1932. Elle rentre aux Etats-Unis.

Lee Miller et Man Ray / Source photo : Manray-photo.com

Reporter de guerre pour Vogue

En 1939, la Seconde Guerre Mondiale éclate. Lassée de la photographie de mode qui n’a que peu de sens lorsque des bombes explosent dans les rues, elle décide de s’engager comme reporter de guerre pour Vogue. Elle suit l’avancée de l’armée américaine, assiste à la Libération en France et au démantèlement des camps de l’horreur. Dans ses clichés, elle joue de ses multiples influences surréalistes, de mode, célébrant les femmes au front. Lorsqu’elle découvre l’horreur des camps de concentration, elle est profondément choquée. Si bien qu’elle cachera ses pellicules dans le grenier de sa demeure se promettant de ne plus jamais les ressortir. C’est son fils qui retrouve les clichés quelques années plus tard et qui se charge de les faire connaître aux yeux du monde.

Lee Miller, « Wartime, Fashion and Lifestyle » Hampstead, Londres, Angleterre, mai 1941

Détruite par l’horreur de la guerre et souffrant d’un mal inconnu de l’époque, le stress post-traumatique, elle sombre dans la dépression et l’alcool. 

Qu’à cela ne tienne, elle reste une figure du photojournalisme. S’aventurant sur un terrain jusqu’alors réservé aux hommes, le reportage de guerre. 

Cécilia Leriche