En plus du racisme latent contre les Asiatiques dans le monde entier, il est aussi présent et important sur les petits et grands écrans. En renforçant les stéréotypes ou en invisibilisant toute une communauté, les films et les séries creusent des inégalités déjà présentes.
« Ca fait du bien de voir des gens comme toi sur les écrans, parce que tu as l’impression d’avoir ta place dans la société, que tu y appartiens », voilà ce que ressent Jessica, 20 ans, une Australienne d’origine chinoise. Et elle n’est pas la seule. En plus d’être considérés comme une minorité, les Asiatiques sont mal ou sous-représentés dans les films et séries. Cette non-inclusion des Asiatiques dans les débats dépend beaucoup de la façon dont ils sont représentés à l’écran. La représentation de la communauté dans les films ou séries fait énormément tiquer, même si pour Albert, Australien d’origine chinoise, « la représentation des Asiatiques a énormément augmenté depuis une dizaine d’années, ce qui est assez encourageant et montre une certaine envie d’inclusion ». On pense notamment au film hollywoodien Crazy Rich Asians sorti en 2018 qui, malgré ses quelques clichés, a réuni pour la première fois depuis 25 ans, un casting entièrement d’origine asiatique.

Des films qui posent problème
Pourtant même ce film a le droit à ses critiques : que des acteurs d’origine chinoise et pour un film se déroulant à Singapour, cela pose un problème. C’est d’ailleurs ce qui est aussi reproché au nouveau Disney sorti en 2021, Raya et le Dernier Dragon. En Asie, il n’y a pas que des Chinois, des Japonais ou des Coréens, mais aussi des Indiens, des Vietnamiens, des Indonésiens, des Thaïlandais… Malgré ses bonnes intentions, pour certains, le film d’animation mélange de nombreuses cultures asiatiques sans se soucier des détails et des différences de chacune.
Quand ils ne sont pas des seconds-rôles ou des personnages caricaturés, les Asiatiques sont tout simplement remplacés par des acteurs blancs. On retrouve alors la problématique du whitewashing : des personnages d’origine asiatique qui pourraient être joués par des acteurs appartenant à cette communauté, mais remplacés par des Occidentaux. On pense à quelques films comme Ghost in the Shell (2017), une adaptation de manga avec Scarlett Johansson dans le rôle principal, ou bien Doctor Strange (2016) avec Tilda Swinton jouant un moine himalayen.

D’après l’étude de l’USC’s Annenberg Inclusion Initiative le pourcentage d’Asiatiques dans les films sortis en 2019 n’atteint que 7,2%, soit 36 films sur 100 dans lesquels il n’y avait aucun personnage Asiatique qui prend la parole, qui a donc un personnage important. Si l’on compare à 2017, il y avait un pourcentage de 4,8% d’Asiatiques, mais avec 37 films dans lesquels un personnage était important.
Des voix qui s’élèvent
Beaucoup de célébrités élèvent la voix contre ces problèmes : « on en a marre de ces stéréotypes d’Hollywood qui affectent notre moral et limitent qui on pense pouvoir être. On en a marre d’être invisible, d’être confondu avec un collègue ou que l’on nous dise que nos problèmes n’existent pas », dénonce Jeremy Lin, joueur de basketball en NBA, Américain d’origine taïwanaise. Sandra Oh, actrice de Grey’s Anatomy et Killing Eve d’origine sud-coréenne, est l’une des premières à manifester : « Le Hollywood blanc n’écrit pas notre culture », dénonce-t-elle. Elle marque l’histoire alors qu’elle devient la première actrice d’origine asiatique à être nominée pour l’Emmy Award de la meilleure actrice dans une série télévisée dramatique, ainsi que la première à recevoir un Golden Globe en 2019 pour la meilleure actrice dans une série télévisée dramatique avec Killing Eve.
Le but de poser la question de la représentativité sur les écrans a une grande importance. Si l’on ne voit personne qui nous ressemble ou si l’on ne voit personne qui nous diffère sur les écrans, on en oublie leur seul existence. Kelly Marie Tran, actrice de Star Wars, qui avait dû fermer son compte Instagram à force de se faire harceler sur les réseaux, écrivait dans une tribune du New York Times qu’elle « veut vivre dans un monde où les enfants de couleur ne passent pas leur adolescence à rêver d’être blancs ». Le monde n’est pas que d’une seule teinte. Et heureusement. En invisibilisant toute une communauté et sa diversité sur petits et grands écrans, cela invisibilise des pans entiers de populations qui existent pourtant et qui se battent chaque jour pour se faire reconnaître et écouter. Sans compter les autres pays du monde, l’Asie représente environ 60% de la population mondiale. Un peu compliqué d' »oublier » leur existence. Il serait quand même temps que Hollywood ouvre les yeux et inclue plus de couleurs dans ce monde bien trop blanc.
Margaux Chauvineau
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