Dans les années 1930, la télévision en France connaissait un véritable essor. Seulement voilà, la guerre met un terme à tous ces projets. En 1942, c’est un Allemand, Kurt Hinzmann qui va reprendre les choses en main, et instaurer un véritable centre de télévision à Paris avec comme objectif : remettre du baume au cœur aux soldats allemands blessés dans les hôpitaux français. Un héritage qu’il laissera à la France à son départ.
Occupation allemande rime avec action de propagande ? C’est en tout cas, ce qu’ont craint les techniciens français, peu de temps avant l’arrivée des troupes allemandes. Le 12 juin 1940, ils s’attardent à saboter les installations de télévision de la Tour Eiffel. Avant l’occupation de la France par l’armée allemande, cet émetteur était le plus performant au monde. Désormais saboté, l’Allemagne compte bien récupérer le métal qui la compose. En 1942, la Tour Eiffel, véritable symbole français aurait très bien pu être démantelée. Mais c’est sans compter sur un militaire allemand du nom de Kurt Hinzmann. Jeune soldat affecté au service de propagande à Paris, ancien directeur des programmes d’une chaîne de télévision allemande. Avec l’aide d’un ami dirigeant la station Radio-Paris, il rejette l’ordre de Berlin et a des arguments à faire valoir. De très nombreux soldats allemands, blessés sur le front Russe, sont sur le sol français pour se faire soigner. Quoi de mieux qu’un programme régulier de télévision pour les distraire et favoriser leur rétablissement ? Et pourquoi ne pas utiliser le sommet de la Tour Eiffel à des fins de guerre par du brouillage des communications de l’aviation ennemie ? Des projets qui séduisent le gouvernement allemand. Outre son accord, un envoi de matériels télévisuels est même effectué. Des postes de télévision sont envoyés dans les chambres de soldats blessés et dans le Majestic, hôtel de luxe parisien très fréquenté par l’état-major allemand.
La Tour Eiffel sauvée et un centre de télévision créé
Kurt Hinzmann est en admiration devant l’émetteur qu’est la Tour Eiffel. La compagnie des compteurs de Montrouge et la firme allemande Telefunken sont chargés de remettre les infrastructures techniques en fonction. Très vite, Hinzmann est nommé directeur de la télévision franco-allemande de Paris avec le grade de sous-lieutenant. Il s’attèle alors à organiser un véritable centre de télévision. La question de l’émetteur réglée, place aux studios. Le studio français existant trop petit ne lui convenait pas, il découvre le MagicCity, un ancien dancing, rue Cognacq-Jay. Après d’importants travaux, un grand studio est créé. Fernesehsender Paris, centre de télévision est né. Un centre de télévision important et toujours utilisé aujourd’hui par des chaînes comme RMC pour sa régie, sous le nom de Cognacq-Jay.
La télévision avant tout
Mais revenons-en à l’époque, où Kurt Hinzmann est fin prêt pour lancer ces premières émissions en mai 1943. Pleinement investi dans la mission qu’il s’est fixé concernant la télévision, Hinzmann n’hésitera pas à embaucher des spécialistes de toutes nationalités et tout bords, des juifs, anarchistes, des résistants. Ce qui l’importe c’est de faire de la télévision et de le faire bien. Pendant un an, Fernsehsender diffuse de 12h à minuit avec des émissions en allemand mais aussi en français. Les programmes sont très variés, concerts, théâtre, cirque, films. Avec une obligation : relayer la radio de Berlin en fond sonore. Mais en dehors de cette contrainte, Hinzmann ne se refuse rien, plaçant même du jazz à l’antenne alors que les nazis l’interdisaient. Le 17 août 1944, quelques jours avant la libération, l’ordre est donné de détruire toutes les installations. Refus d’Hinzmann, qui aura jusqu’au bout œuvré pour la télévision laissant tout le matériel opérationnel en France. Recherché par la Gestapo dans son pays, mais reconnu en France qui l’accueillera en 1946 pour diriger une équipe de chercheurs pour la télévision française.
Kévin Mézière
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