L’association « Osez le féminisme » attaque en justice le concours Miss France

L’association féministe « Osez le féminisme » accuse la société Miss France et le producteur Endemol de discrimination et non respect du droit du travail. La présidente de la nouvelle société Miss France, Alexandra Laroche-Joubert, estime que le concours n’est pas « régi pas le droit du travail ».

Des critères stricts : mesurer plus d’1m70, avoir entre 18 et 24 ans, être célibataire et « être représentative de la beauté ». Voilà les conditions pour participer au concours de beauté Miss France. « Discriminatoires » selon Osez le féminisme, qui a décidé le 18 octobre de saisir les prud’hommes. Pour l’association, le concours se veut « sexiste » et « viole le droit du travail ».

Accompagné par trois femmes qui affirment avoir dû renoncer à se présenter au concours car elles ne répondaient pas aux critères exigés, la procédure vise également la société de production Endemol : « l’utilisation des femmes pour fabriquer un programme audiovisuel extrêmement lucratif tout en bafouant le droit du travail ».

Aucun contrat de travail n’est signé. Mais la relation des candidates à la couronne de beauté avec Endemol doit s’analyser come celle liant un employé à son employeur, explique l’association. Le Code du travail interdit, dans un recrutement, tout critère lié « aux mœurs, à l’âge, à la situation de famille ou à l’apparence physique », explique à l’AFP Violaine de Filippis-Abate, l’avocate d’Osez le féminisme. 

Les requérantes réclament aux prud’hommes une condamnation visant à supprimer de leur règlement ces clauses discriminatoires, comme celles interdisant de fumer en public, de porter des tatouages visibles ou des piercings. 

« Quel concours n’a pas de critères ?« 

« Les féministes prennent l’occasion de s’exprimer à ce moment-là », se désole Alexandra Laroche-Joubert. « On ne sait pas si c’est trois femmes qui n’ont pas été admises, se sont présentées au concours. Ce qu’on sait, c’est que l’une d’entre elles est membre du conseil d’administration de l’association et les autres sont des militantes ».

Les accusations de sexisme à l’encontre du concours sont récurrentes mais la présidente de la société a exprimé son souhait de faire évoluer le concept du concours : « Je n’ai plus envie d’être dans le Victoria Secret, dans le tout cheveux et physique », insiste-t-elle. « C’est pour cela d’ailleurs qu’on va permettre aux filles de s’exprimer, pour mieux les connaître. »

Un sentiment partagé par Odelya Suiste. Agée de 22 ans, la jeune femme a déjà participé deux fois au concours Miss France, et cette année, elle a été élue 2ème dauphine de Miss Picardie 2022. « Tout au long de notre vie, que ce soit les concours d’entrée pour une école ou même les concours pour rentrer dans une profession, tous ont des critères. Chaque concours est libre d’imposer les siens. Alors oui, le concours Miss France est le plus connu, mais d’autres existent avec des critères ! ».

Concernant les accusations de non-rémunérations, Odelya l’affirme, elles savent et acceptent un règlement qui stipule ces éléments. « Je ne fais pas ça pour amasser de l’argent, c’est un passe temps, une passion comme une autre. Il y a tellement plus à recevoir qu’un virement en guise de salaire ».

Des stéréotypes et un sexisme qui perdurent

Pour nombreux Français, le concours de Miss France entretient de nombreux clichés et stéréotypes sur les candidates. La jeune femme qui sourit, grande, blonde, toute fine et qui ne dit que des banalités. Encore une fois, Odelya a la réponse aux détracteurs.

« Il faut s’intéresser pour voir que c’est tout autre chose. Je défie chaque personne qui parle de stéréotype à monter sur scène et à prendre le micro devant 2 000 personnes. On verra si la moitié en sera capable ».

Odelya Suiste

Dans son « Rapport annuel sur l’état des lieux du sexisme en France », en 2019, le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes (HCE), une instance consultative chargée de conseiller le gouvernement, avait lui-même qualifié le concours Miss France de « caricature archaïque ». Il avait dénoncé notamment l’exigence faite aux candidates d’être célibataires et sans enfant, et même de ne jamais avoir été mariées.

Claire Boubert