Le modèle pavillonnaire a un nouveau voisin : l’habitat partagé

Jeudi 14 octobre s’est tenue la restitution de la consultation citoyenne « Habiter la France de demain ». Présidée par la ministre du Logement Emmanuelle Wargon, la conclusion des débats initiés en février dernier montre le chemin de la densification des villes. Cette perspective est peu attrayante pour le français habitué au schéma pavillonnaire. Elle pourrait néanmoins se concrétiser sur le modèle participatif du collectif lillois « Voisins et cætera ». Allier confort urbain et densification : mission impossible ? 

Immeuble de Voisins et Cætera

« Non-sens écologique, économique et social ». La ministre du Logement Emmanuelle Wargon n’a pas masqué son mépris pour le rêve pavillonnaire du Français moyen. Face aux problématiques engendrées par l’étalement urbain, le ministère propose un nouveau paradigme pour « Habiter la France de demain ». La levée de bouclier du pôle Habitat de la Fédération française du bâtiment face à cette attaque laisse présager que la route à la densification sera longue. Le pôle pointe du doigt une incompréhension d’une élite parisienne, « loin des territoires, des habitants et de leurs préoccupations ». Anne Dassonville, membre du collectif « Voisins et cætera », témoigne de son expérience : 

Qu’est-ce que c’est un habitat partagé ? 

C’est un projet collectif. Parmi les personnes qui habitent aujourd’hui dans notre habitat partagé, on a presque tous participé à sa construction. Le programme a 10 ans, mais nous ne vivons ensemble que depuis 4 ans. On avait donc à l’origine une même idée à laquelle on a pu donner forme ensemble. Au début de la vie commune, c’était beaucoup de réunions et de chantiers collectifs (construire l’abri à vélo, aménager la salle commune etc.). Maintenant, on se retrouve une journée par mois pour préparer des projets, entretenir les parties communes etc. On essaye aussi d’organiser des activités groupées, on accueille des migrants une fois tous les deux mois. 

Parmi les habitants de votre habitat partagé, on trouve quelques enfants. Comment grandit-on dans un tel cadre ?

Ils sont plutôt contents : ce sont des enfants qui jouent beaucoup entre eux. Le jardin est assez grand, ça leur permet d’organiser leurs activités. Quatre familles ont des enfants, neuf au total, qui ont de 4 à 15 ans. On organise aussi une réunion avec eux pour écouter leurs demandes. Mais finalement, notre mode de vie ne se fait pas par classe d’âge, et moi qui suis sexagénaire, ça me plaît d’avoir un peu de toutes les générations.

Un des aspects qui revient souvent dans les problématiques d’habitat est l’impact environnemental. C’est la raison principale qui vous a poussé à créer « Voisins et cætera » ? 

On est tous plus ou moins sensibilisés à la question environnementale. Certains le sont dans le travail, d’autres de manière militante, et d’autre enfin le sont dans leur vie quotidienne. Dans notre cahier des charges, on visait l’habitat le plus écologique possible. On a essayé d’éviter au maximum les énergies fossiles, avec une chaudière à brûler par exemple. Cela étant, ce sont des logements sociaux, et on avait des plafonds. Nous avons donc fait au mieux avec le budget à notre disposition ! En ce qui concerne notre mode de vie, on a planté quelques fruitiers, des massifs de fruits et de légumes, mais on ne peut pas dire qu’on cultive vraiment. On est assez fiers de la diversité de notre jardin. 

Un autre angle abordé par la convention citoyenne a été l’usage de la voiture. Comment se déplace-t-on à « Voisins et Cætera » ? 

On n’a pas tous une voiture, donc on les partage un peu. Ceux qui ont des voitures la prêtent s’ils n’en ont pas besoin. Une famille se déplace complètement à vélo. Une autre famille n’a pas de voiture, et les autres lui en prêtent une. On réfléchit à en avoir moins, mais bien sûr certains en ont besoin pour travailler. Finalement, on utilise beaucoup les transports en commun et le vélo. En tout, on a 6 voitures pour 8 familles. 

Marin Daniel-Thézard