Vichy, les racines d’Albert Londres 

À Vichy, il est d’autres histoires que la guerre. Originaire de la ville, Albert Londres, malgré ses incessants voyages, restera toujours fortement attaché à ses racines. Réouverture de sa maison natale et exposition de cartes postales destinée à sa fille, reportage rue de Besse, aux prémisses d’un parcours de vie exceptionnel. 

« La grande affaire est de bouger », les mots de Robert Louis Stevenson semblent flotter dans les rues de Vichy… À quelques pas des volcans d’Auvergne, dans la cité thermale au passé historique malheureux, il est 16 heures. En ce dimanche 7 novembre, quelques curieux s’amassent devant l’Église Saint-Blaise, à quelques mètres d’une drôle de bâtisse. Une fantaisie de briques et de parpaings agrémentée de deux tours factices qui lui donnent des allures de château de pacotille. « C’est ici qu’est né Albert Joseph Baptiste Londres, le jour de la Toussaint 1884 », annonce une passante avec fierté. 

Rue Besse, dans le Vieux Vichy, Albert Londres voit le jour dans cette maison au style néo-médiéval, propriété de son grand-père, Eugène Baratier, ferblantier. Sa mère a tout juste 18 ans, et son père, fils de marchand de toile, 20 ans. Très vite, le jeune couple déménage quelques rues plus loin dans la « Villa italienne », en face du parc Lardy et crée une pension de famille. Le jeune Albert étudie à l’école primaire Saint-Joseph de Vichy puis devient pensionnaire au lycée Saint-Gilles à Moulins. Lyon, puis Paris et enfin, le monde. Albert Londres grandit, devient grand reporter. Et père. En 1905, sa compagne meurt, le laissant seul avec un bébé de onze mois. Miné par le chagrin, incapable à 21 ans d’élever seul sa fille, Florise, il la confie à sa mère. Albert revient à Vichy dès qu’il le peut pour les voir. Et le reste du temps, des cartes postales des cinq continents pleuvent rue des Célestins. 

Réouverture de la maison Albert-Londres à Vichy

« Après les vitrines, les huisseries, les devantures du rez-de-chaussée sont terminées. C’est la première exposition dans la Maison Albert-Londres. C’est une victoire : la demeure était encore à l’état d’abandon, il y a peine plus de dix ans. », se réjouit Marie de Colombel, présidente de l’association Maison Albert-Londres. Restée fermée plus de 30 ans, l’emblématique bâtisse a interpellé des générations durant les jeunes esprits. « Malgré son intérêt architectural, elle menaçait de disparaitre. L’association en fait donc l’acquisition en 2014 et entreprend sa restauration dès 2017. », explique Marie de Colombel. Tout s’accélère cette année, avec le concours de fonds européens (programme de fonds LEADER) : des travaux sont engagés pour aménager une grande salle d’exposition au rez-de-chaussée. Avec les vitrines refaites, la maison natale d’Albert Londres reprend vie. 

« Chère Florise, qui sera le premier, la carte ou moi ? Je serai le 14 à Marseille, je filerai sur Vichy. À très vite. » : à l’intérieur, sur tous les murs prônent des milliers de cartes postales en provenance des quatre coins du globe. Immersion dans la correspondance entre Albert Londres et sa fille. Dans la seconde salle, prône même le fameux piano de Florise offert par son père et autour duquel tous deux se retrouvaient, lors des escales vichyssoises du journaliste. « Pour cette première exposition, c’était important pour nous de mettre en avant l’attachement du reporter à sa ville natale, à travers sa relation fusionnelle avec sa fille. », confie Marie de Colombel. 

« Chère Florise, qui sera le premier, la carte ou moi ? »

La restauration de la maison d’Albert-Londres est loin d’être finie : l’association continue à rechercher des mécénats, des financements publics et des dons de particuliers. « Notre association tient aussi à mettre en valeur l’héritage littéraire et intellectuel de l’écrivain- journaliste, poursuit la présidente, On organise régulièrement des événements autour de sa vie, des périples et de son oeuvre, avec des conférences, des tables rondes… » De ses reportages sur le Tour de France, à ses sujets en Arabie, les rendez-vous se succèdent. Une chaine Youtube a même été créée en 2020 afin de diffuser une multitude de vidéos, de webconférences toujours autour du « père du grand reportage ». BD, ouvrages biographiques, essais, les bénévoles sont passionnés et enchainent les projets. « Nous avons pour objectif d’ouvrir définitivement la maison Albert-Londres au public, en tant que boutique et médiathèque avec une exposition multimédia permanente, mais aussi un centre de ressources et de documentation. », conclut Marie de Colombel. À Vichy, rue Besse, la parole de celui qui portait la plume dans la plaie n’a pas fini de résonner. Attaché au monde, mais surtout à ses racines, Albert Londres aimait sa ville natale. Et vice versa. 

Marie Chéreau