Roberta Metsola : une antiavortement à la tête du Parlement européen

La semaine dernière, l’Italien démocrate et président du Parlement européen David Sassoli est décédé. Pour le remplacer, s’est tenue à Strasbourg cette semaine une campagne autour de quatre candidats : trois femmes et un homme. 

Parlement européen – crédit : Pixabay

57 voix (sur 690 exprimées) pour l’Espagnole Sira Rego (gauche radicale), 101 voix pour la suédoise Alice Bah Kuhnke (les Verts) et 458 voix pour la maltaise conservatrice Roberta Metsola. Bien aidée par le retrait de dernière minute de son collègue – le polonais conservateur Kosma Zlotwski – mardi, jour de ses 43 ans, Roberta Metsola a accédé à la présidence du Parlement, et ce pour quatre ans. 

Une présidente

« Il est temps que le Parlement européen soit dirigé par une femme » a écrit la nouvelle présidente sur son twitter. En effet, le fait qu’une femme soit élue est un pas en avant : cela n’était pas arrivé depuis 1999 avec Nicole Fontaine. En comptant la première à y accéder, Simone Veil première présidente élue au Parlement européen en 1979, elles ne sont que trois à avoir été à la tête de l’institution strasbourgeoise. Contre 13 hommes.

Mais cette élection a aussi provoqué des remous. Certes, Roberta Metsola est une femme, ayant un fort engagement européen, mais elle a également de fortes convictions conservatrices qui dérangent. La plus contestée : son opposition à l’avortement. Manfred Weber, président du groupe Parti populaire européen (PPE) dit de Roberta Metsola qu’elle est la moins conservatrice de son groupe politique et est « une femme jeune, moderne et progressiste ». Néanmoins, elle porte aussi à son actif le fait de s’être abstenue en septembre 2021 lors du vote d’une résolution parlementaire demandant la criminalisation des violences faites aux femmes. 

Si elle s’engage pour l’Etat de droit, l’immigration ou encore les droits des communautés LGBT, c’est moins le cas pour le combat des droits des femmes.

Le deal des compromis

Mais alors, pourquoi les sociaux-démocrates et les libéraux ont-ils voté pour cette candidate, aux valeurs différentes des leurs ? Pour respecter leurs engagements. 

En juin 2019, lorsque le PPE remporte les élections européennes, les trois groupes se sont alliés afin de former une majorité parlementaire et ont conclu un accord prévoyant une division des mandats du président du Parlement, en donnant le siège d’abord aux sociaux-démocrates (ce qui était le cas avec David Sassoli) puis aux conservateurs. Promesse tenue. 

Un symbole avant tout

« Le symbole de cette élection me gêne » a reconnu mercredi le secrétaire d’État aux affaires européennes, Clément Beaune, sur France Info. Il est vrai qu’il n’y aucun risque que le droit comme celui de l’avortement soit menacé puisque cela ne relève pas de la fonction du président du Parlement. Mais c’est un autre son de cloche pour la symbolique.

Avoir Roberta Metsola à la présidence 42 ans après Simone Veil, grande architecte de la loi dépénalisant l’avortement en France, cela passe mal. Avoir une antiavortement à la tête du Parlement est un symbole fort quand on pense que ce droit est encore sévèrement puni dans bon nombre de pays du monde (y compris européens comme Malte), et lorsqu’il est sans cesse remis en cause comme aujourd’hui en Pologne.

Honorine SOTO