Les mangas et les animes japonais sont connus pour mettre en scène des personnages féminins souvent hypersexualisés. Quelques années après #MeToo, les représentations féminines y sont-elles toujours aussi caricaturales ?
C’est un trouble qui persiste. En 2018, l’anime L’attaque des Titans qui compte des personnages féminins forts et fins stratèges, connaissait un succès monstre. En parallèle, le mouvement #MeToo éclatait et le site France Info diffusait une vidéo choc. Hypersexualisation du corps de la femme, rôles dits de soutien où elles sont mises au second plan, gestion des tâches ménagères, maladresses sur la question du consentement… Tous les travers sexistes de l’anime et du manga étaient passés au crible. Les représentations féminines sont-elles toujours aussi caricaturales aujourd’hui ? Tour d’horizons des représentations féminines dans la pop culture japonaise.

Des « mangas pour garçon »
De Naruto à Fairy Tail en passant par One Piece ou Dragon Ball, aucun n’y échappe. Des clichés alarmants sont infligés aux personnages féminins. Alors que les héros de ces œuvres sont toujours des hommes forts et courageux. Les femmes elles, existent souvent par prétexte pour le protagoniste. Dans Hunter x Hunter, le héros, Gon, est entouré d’une bande d’amis composée exclusivement d’hommes.

L’explication est toute simple : ces oeuvres appartiennent aux mangas de type shōnen. Et la cible éditoriale du shōnen est, à l’origine, constituée principalement de jeunes adolescents de sexe masculin. Les filles elles, sont destinées au shojo : un genre « amour » et « romantique » qui se déroule souvent dans un lycée. On peut donc résumer l’univers du manga en sentimentalisme pour les filles et violence pour les garçons.
Pour cette raison, les femmes se retrouvent ultra-sexualisées et se sont constamment confrontées à des comportements sexistes. D’ailleurs, les éditeurs japonais n’hésitent pas à faire des enquêtes auprès des lecteurs pour savoir s’ils trouvent les héroïnes suffisamment sexy. Nami, dans One Piece, en est un exemple flagrant. Elle voit son corps évoluer au fil des saisons, sa poitrine devenant plus imposante à chaque épisode.
Un impact psychologique désastreux
Pourtant, ces mangas et animes sont destinés à un public d’une moyenne d’âge de 10 et 20 ans. Déjà dans les années 80, le Club Dorothée faisait découvrir à un jeune public de nombreuses séries animées japonaises. Le problème : l’impact psychosociologique qu’elles peuvent avoir sur les enfants et adolescents. Voila ce que déplorait l’ONU en 2015 en demandant l’interdiction des mangas et autres illustrations à caractère sexuel impliquant, notamment, des mineurs. En vain.

Certains mangas font le culte du viol et tendent à banaliser les violences sexuelles. Placés sous ironie, les comportements et remarques sexistes font rage. Mais il ne faut pas oublier que les femmes ne sont pas considérés de la même manière au Japon qu’elles ne le sont en France. Les manga et anime ne sont que le reflet de la société japonaise.
Un petit pas pour les femmes
Mais les temps changent, et les mentalités aussi. La culture japonaise se diversifie et transforme désormais l’image de la femme. Elle devient plus forte, moins sexy. Le personnage de Mikasa dans L’Attaque des Titans en est l’exemple frappant : combattante, courageuse, armée jusqu’aux dents et pourtant non dénudée. L’anime My Hero Academia (encore récent) présente bien plus de personnages féminins que ses ancêtres.

Mais le chemin est encore long. Et il faudra attendre que la prise de conscience se fasse au Japon pour que les mangakas proposent réellement des œuvres plus égalitaires. En attendant, les éditeurs français semblent prendre quelques précautions (depuis #Metoo), en obscurcissant les passages des franchises japonaises qu’ils jugent trop irrespectueux envers les femmes.
Cidjy Pierre
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