Michel Sardou : l’homme qu’on aime détester (et qu’on déteste aimer)

Il fête cette année ses trois quart de siècle. Michel Sardou, homme contesté et contestataire, a pendant 40 ans fait valser ou chantonner les Français. Mais qu’est-ce qui (dé)plait tant chez Michel Sardou ? Explication.

Michel Sardou a tiré sa révérence en décembre 2016, après près de 40 ans de carrière. DR

On se souvient d’une phrase très juste d’Éric Elmosnino dans La Famille Bélier : « Lorsque tout va mal, qu’il n’y a plus aucun espoir, il reste Michel Sardou ».

Faut-il le rappeler, Michel Sardou est l’un des chanteurs préférés des Français. En quelques chiffres, Michel Sardou, c’est 26 albums en 50 ans de carrières. C’est aussi 350 chansons, 5 Victoires de la musique et près de 100 millions de disques vendus.

Souvent taxé de chanteur engagé, sa carrière débute sur une notoriété fracassante. En 1967, il sort son premier succès, Les Ricains. Alors que la France vient de sortir de l’OTAN, et que la guerre du Viêt Nam provoque une vague d’antiaméricanisme généralisée, Michel Sardou chante le devoir de reconnaissance envers les États-Unis suite à la Libération de 1944. La musique est aussitôt censurée sur ordre du Général de Gaulle.

Parler à la France profonde

Mais peu importe, Michel Sardou continue. Il se lance alors malgré lui dans la chanson populaire. Il parle au peuple, à la France profonde, à son quotidien, sur des airs entrainants et folkloriques. Ce sera J’habite en France ou encore les Bals populaires. Le Rire du Sergent sera largement inspiré de sa propre histoire. Un jeune homme qu’on vient chercher parce qu’il n’a pas effectué son service militaire.

Sardou, c’est aussi des polémiques. De tout genre. Au début des années 1970, des mouvements féministes dénoncent le caractère patriarcal de ses chansons, ou sexiste. On l’accusera de colonialisme et de raciste quand il évoquera les bons souvenirs du Temps des Colonies ou sera taxé « d’apologie de la peine de mort » avec Je suis Pour, une chanson qui réclame justice pour un enfant assassiné.

Fin des années 1970, Michel Sardou décide de mettre sa notoriété au service des causes qui lui sont chères. Il dénoncera l’abandon du mythique bateau Le France par le gouvernement Chirac ou critiquera le système éducatif français dans Le Bac G en 1990.

Mais plus étonnant encore, on découvrira en Michel Sardou une fibre écologique qu’il défendra dans J’accuse.

Une suite plus calme avant une fin définitive

Cependant, face aux combats, le chanteur s’épuise vite. Il faut aussi ajouter à cela les nombreuses manifestations à son encontre ou encore le dépôt d’une bombe dans une salle de spectacle à Bruxelles, dans laquelle il devait chanter. Il s’orientera désormais vers des chansons plus douces, plus introspectives, plus sociale aussi. Une façon de prendre du recul sur ses positions. Il repensera à son enfance dans En chantant par exemple, parlera d’amour dans Je vais t’aimer, défendra l’émancipation des Femmes dans Être une femme.

Depuis 1990, Michel Sardou se fait plus discret. Il sort moins d’album et se réoriente vers la comédie. Promotion canapé au cinéma, Bagatelle au théâtre.

Et le 8 décembre 2016 une annonce va faire l’effet d’une douche froide. Michel Sardou quitte la musique. Mais il ne quitte pas totalement son public. Après une dernière tournée d’adieu, il reprendra sa carrière tant aimée, sur les planches avec la super pièce Représailles, dans laquelle il jouera le mari de Marie-Anne Chazel.

Dans la Famille Bélier, on y entendait : « Michel Sardou est à la variété française, c’est que Mozart est à la musique classique, intemporel ». Si Michel Sardou ne chante plus, il est impressionnant de voir le nombre de reprises ou d’allusion à ses chansons. On évoquait La Famille Bélier, mais on peut aussi citer le nouvel album des Kids United.

Comme quoi, Sardou peut encore parler d’un temps que les moins de 20 ans pourrait connaître.

Benjamin Grischko