Il est de notoriété publique qu’en terme d’accès, de niveau, de reconnaissance ou de diffusion, le sport féminin accuse un beau retard sur son collègue masculin. Mais dans certains pays, le retard devient une privation pour des femmes qui vivent opprimées dans la société, et pour qui jouer au foot devient alors un symbole de liberté. C’est le cas du Soudan et de sa très jeune équipe nationale de football féminin.
Au Soudan, les droits des femmes sont une avancée aussi récente que la liberté de la population. Dans ce pays d’Afrique du Nord, sous le joug d’une dictature militaro-islamiste installée par Omar El-Béchir depuis 1989, les femmes sont traitées comme des citoyens de seconde zone : peu voire pas d’accès au travail, un rôle cantonné à celle d’une mère pour les enfants et d’une épouse pour le mari…Mais en 2019, une révolution populaire renverse le régime et installe un gouvernement de transition. Les femmes, grandes artisanes de ce soulèvement, font supprimer certaines lois discriminatoires à leur sujet et peuvent maintenant danser, porter des pantalons mais aussi…créer une équipe de foot !

Un début difficile mais hautement symbolique
C’est comme ça qu’est née la sélection soudanaise de football féminin, la plus récente de la discipline. Avant ça, une ligue de football féminin soudanaise a été lancée le 30 septembre 2019, la toute première du pays avec 21 équipes. Après une année réussie, la fédération sélectionne les meilleures joueuses et crée une équipe nationale, qui participera à sa première compétition internationale lors la coupe arabe de foot féminin en 2021. Le sélection a donc joué son premier match officiel il y a à peine 6 mois, le 24 août dernier, et on retiendra le symbole plutôt que le résultat : une lourde défaite 10-0 face aux Égyptiennes.
Une femme et un nom derrière la révolution : Salma Al-Majidi
Enfin, tout ce projet de développement du football féminin au Soudan est principalement l’oeuvre d’une femme : Salma Al-Majidi. La sélectionneuse des féminines du Soudan jouait déjà en secret sous la dictature, avant de devenir à 29 ans la première femme du monde arabe à entraîner une équipe de football masculine. La jeune femme est aujourd’hui considérée parmi les « 100 femmes qui inspirent dans le monde » de la BBC. Elle estime que cette révolution a déjà permis de « changer les mentalités », même si plusieurs joueuses ont fait part de leur inquiétude face à l’instabilité récente du régime soudanais. Celui-ci nous rappelle aussi que l’accès au sport, comme les droits des femmes, est encore un combat à mener chaque jour.
Antoine JAMES
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.