Le 20 février alors que Fabien Roussel enregistre ses scores les plus hauts dans les sondages, le média dirigé par Edwy Plennel publie un article qui vient semer le trouble. Ce dernier est accusé d’avoir été l’assistant fantôme du député du Nord Jean-Jacques Candelier entre 2009 et 2014. Depuis les équipes du candidat tentent de noyer le poisson, c’était sans compter l’ouverture au mois de mars d’une enquête préliminaire par le Parquet national financier. Antton Rouget, journaliste à Médiapart et co-auteur de l’article mettant en accusation le candidat communiste, nous a donné son ressenti face à l’affaire.

Pourquoi vous être penché sur l’affaire ?  Comment s’est déroulée l’enquête ?

Nous nous intéressons à toutes les candidatures à l’élection présidentielle, partant du principe que les électrices et électeurs doivent être le mieux informé·es possible pendant la campagne. Nos enquêtes portent sur les programmes et propositions mais aussi sur les parcours des candidates et candidats. C’est comme cela que nous avons été amenés à enquêter sur les idées et le parcours de Fabien Roussel, qui est un responsable politique relativement récent dans le paysage politique national.

Depuis Fabien Roussel n’a produit aucune preuve tangible de son innocence, est-ce pour vous un aveu implicite de culpabilité ? Une tentative pour faire oublier l’affaire (on sait que la justice en France est très longue et que ce ne sera pas réglé avant le 10 avril date du premier tour des élections) ?

Nous faisons attention à ne pas nous placer sur le terrain du droit, en restant sur les faits. C’est la raison pour laquelle nous ne parlons pas d’aveu ou de culpabilité. Sur le seul terrain des faits, les choses sont relativement claires aujourd’hui : Fabien Roussel n’a pas publié le moindre élément de sa collaboration avec son député. On parle ici de cinq années de travail à temps plein. Nous n’imaginons pas que s’il avait des éléments probants dans ses archives, il aurait fait le choix délibéré de ne rien diffuser. Il a d’ailleurs publié un « dossier » sur son site internet, comportant des pièces insignifiantes.

 Récemment Fabien Roussel a dit : “Ce que je sais, c’est qu’Edwy Plenel a appelé à voter Mélenchon, et que c’est le directeur du journal qui a fait cette enquête sur mon dos”, ainsi que “je savais bien qu’en me présentant à cette élection présidentielle, et qu’en suscitant une certaine sympathie, même une dynamique autour de la campagne que je porte, une partie de ball trap serait ouverte”.

Est-ce pour vous une délégitimisation, une remise en cause du travail des journalistes en période d’élection présidentielle ? 

C’est malheureusement un grand classique dans l’histoire politique française. On tente de dé-ligitimer le messager, plutôt que de répondre sur le fond. Il est d’ailleurs intéressant de constater que cette attaque est venue après l’annonce de l’ouverture de l’enquête PNF, alors qu’avant cela Fabien Roussel tenait un discours inverse nous concernant. Sur le fond, c’est assez ridicule. Si je me prends mon simple cas, je suis tour à tour taxé de mélenchoniste, macroniste, écologiste, etc. Cela en devient même grossier. Je ne pense pas que le personnel politique en sorte grandi…

Emma Rieux-Laucat