MMA et sports de combat : Un changement de loi et de perception

De par leur caractère et leur essence qui mettent en jeu l’intégrité physique des protagonistes, les sports de combat nécessitent un encadrement strict à travers la loi. Entre légitime défense et évolution des perceptions, la problématique est entrée dans une nouvelle dimension avec la récente légalisation du MMA en France.

C’était le 31 janvier 2020. La ministre des Sports Roxanna Maracineanu décide de légaliser le MMA (« Mixed Martial Arts » pour « Arts Martiaux Mixtes ») en remettant l’organisation de la discipline à la fédération française de boxe. Un soulagement pours les amateurs du genre, qui « combattaient » depuis 15 ans pour cette reconnaissance. Jusqu’alors, la France était le seul pays européen à interdire le MMA professionnel, et avait même confirmé cette interdiction par décret encore récemment, fin 2016. C’est ainsi que 40,000 sportifs ne pouvaient être officiellement licenciés dans des clubs et fédérations, ouvrant la porte à une pratique clandestine ou à l’étranger.

Mais depuis, la discipline a connu deux avancées majeures. D’abord, les acteurs du MMA ont appris à structurer leur sport : mise en place d’un système de grades, collaboration avec la fédération internationale, pour faire naître une progression technique avec des enseignements, comme dans tout sport de combat. Ensuite, le changement de la perception du MMA et des autres disciplines dans la société. Aujourd’hui, la pratique des arts martiaux (judo, karaté, taekwondo…)  et des sports de combat (Boxe, Lutte, MMA…) est une vraie tendance populaire, notamment chez les jeunes. Comme le dit Bertrand Amoussou, un des pionniers dans l’essor de la discipline : « Vous demandez à n’importe qui dans la rue, les gens connaissent, ce qui n’était pas le cas il y a 5 ans ».

Cette tendance s’est développée ces dernières années grâce à la diffusion de plus en plus importante de ces sports de combat, le MMA en tête avec l’Ultimate Fighting Championship (UFC). Cela a créé plusieurs vocations qui ont permis petit à petit de « dédiaboliser » l’image extérieure que l’on pouvait avoir des sports de combat : dangereux, physiques, risque de blessures important…Autant d’éléments qui ont nécessité un encadrement strict par la loi.

Les jeunes du club de MMA de Liévin (62), de plus en plus nombreux à s’entraîner chaque semaine. Crédit Photo : Antoine James

Les pratiquants de sport de combat, en France, sont inscrits dans un club représentant une fédération sportive ce qui les soumet aux règles qui entourent la pratique sportive et associative. Celles-ci permettent aux combattants d’être protégés en cas de blessures pendant un entraînement et/ou une compétition. La question est plus complexe lorsque l’on aborde un autre aspect de l’utilisation et de la pratique des sports de combat : le self-défense.

La popularité grandissante du genre a démocratisé sa pratique, qui se fait notamment de plus en plus pour « pouvoir se défendre face à un agresseur ou dans la rue », en cas de harcèlement par exemple. Une problématique qui, elle aussi, s’est beaucoup développée ces dernières années, multipliant les cas d’agressions mais aussi de riposte, et d’utilisation de la légitime défense. La notion est définie par les articles 122-5, 122-6 et 122-7 du Code Pénal, et s’appliquent à l’usage des arts martiaux et sports de combat pour l’auto-défense.

Ainsi, pour déclarer l’usage de ces pratiques comme de la légitime défense, elles doivent répondre à quelques conditions : cela doit être sur l’instant, nécessaire et la riposte doit être « proportionnée ». C’est tout cette notion qui conditionne l’utilisation d’un art martial en dehors du cadre sportif, car elle peut faire office de circonstance aggravante si la légitime défense ne peut pas être prouvée ou si la riposte avec les arts martiaux est trop importante. Dans le cas où la riposte sera considérée comme une agression, « le fait d’être expert ou pratiquant confirmé d’un art martial peut engendrer des sanctions plus lourdes du fait du caractère dangereux et parfois létal des coups et prises de ces sports », mais cela reste de l’ordre du cas par cas. Cependant, la légende urbaine selon laquelle les ceintures noires et hauts gradés d’arts martiaux ou sports de combat seraient considérés comme disposant d’une arme blanche aux yeux de la loi, est fausse. Mais le problème reste clair : la justice française doit encore travailler sur le cadre de l’utilisation d’une pratique qui se répand plus que jamais.

Antoine JAMES