Prix Bayeux des correspondants de guerre : « veni, vidi, dici »

L’édition 2021 du prix Bayeux Calvados-Normandie des correspondants de guerre s’est achevée ce dimanche 10 octobre après une semaine de rencontres, de débats et de projections qui mettent à l’honneur le travail de l’ombre des reporters de guerre. Les sujets y étaient nombreux avec au programme des discussions sur l’Afghanistan, la Syrie ou encore le Yémen, mais c’est la Birmanie qui s’est retrouvée sous les feux de la rampe ! 

Pour sa 28e édition, la « capitale internationale de la presse » comme l’avait déclaré Ed Vulliamy, président de l’édition 2020, a rouvert ses portes au public venu nombreux applaudir ces hommes et ces femmes qui œuvrent au quotidien à mettre en lumière les conflits qui font l’actualité internationale. Véritable rendez-vous pour le métier, le prix Bayeux était cette année présidé par le photojournaliste franco-iranien Manoocher Deghati qui a salué le courage des photojournalistes et l’importance croissante de la photographie dans le reportage de guerre. Lors d’un entretien pour Polka et Nikon où il est revenu sur ses 50 ans de carrière, il a rappelé sa « soif de raconter la vérité, de dénoncer le mal que font les régimes dictatoriaux et totalitaires », soif qui explique le choix du jury international de décerner le premier prix de la photographie à un journaliste anonyme birman.

Raconter au péril de sa vie

Pour la première fois le prix Bayeux de la photographie a été décerné à un journaliste dont l’identité ne pouvait être dévoilée pour sa sécurité. Le jeune homme, qui était pourtant présent dans la salle, a photographié pour le New-York Times la « révolution du printemps » suite au coup d’Etat militaire en Birmanie du 1er février 2021. Il rapporte ainsi à Visa pour l’image : « En tant que photojournaliste birman indépendant, je risque ma vie pour couvrir la révolution du printemps en Birmanie et la répression brutale de l’armée. Des journalistes ont été poursuivis, plus de 70 ont été arrêtés et certains ont été contraints à l’exil. Sur le terrain, nous avons cessé de porter nos casques marqués ‘PRESSE’ quand nous nous sommes rendu compte que les militaires ciblaient les photographes. » (Source France Inter).

« En tant que photojournaliste birman indépendant, je risque ma vie pour couvrir la révolution du printemps en Birmanie et la répression brutale de l’armée. »

Ce prix vient donc saluer le courage et « les conditions dans lesquelles travaillent de très jeunes photographes, professionnels ou amateurs, et l’importance du sujet » a déclaré M. Deghati à l’AFP.

La Birmanie mise à l’honneur lors de cette édition 2021

Au travail de ce jeune photographe birman s’agrège celui de douze autres photojournalistes anonymes, dont les efforts conjugués font l’objet d’une exposition temporaire à Bayeux, intitulée « Myanmar Printemps 2021 », visible jusqu’au 31 octobre ! L’ensemble de ces photos sont un témoignage précieux des mois d’horreur que viennent de vivre les Birmans, après que la junte militaire a pris le pouvoir, mettant ainsi un coup d’arrêt brutal à des années de transition démocratique.

Dans ce pays coupé du monde depuis février 2021, le journalisme local est plus que jamais précieux, particulièrement pour les manifestants pro-démocratie qui subissent depuis lors une répression sanglante de la part de l’armée birmane. Dans un entretien à Polka, le lauréat du prix de la photographie a ainsi déclaré au sujet de l’exposition et de sa nomination au prix Bayeux « Ces photos sont notre cri à tous. Cette exposition et ce prix contribuent à mettre un coup de projecteur sur ce qui se passe chez nous. Cela nourrit l’espoir de ceux qui restent optimistes sur le devenir du pays. » Espérons que le temps leur donnera raison…

Fleur Tirloy