Russia Today : « Je ne me suis jamais sentie payer par la Russie »

Ce dimanche 27 février, l’Union européenne a annoncé la fermeture des médias d’Etat russe Russia Today (RT) et Sputnik. L’organisation justifie cette décision via le règlement européen de 2014 “concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine”. Julie Vachet (nom d’emprunt) était étudiante à l’université Catholique de Lille l’année dernière. Dorénavant pigiste à Barcelone pour RT, elle exprime son désaccord.

Tous les contenus de RT France ont été supprimé, autant sur le site que sur Youtube, cf Le Progrès

Quel regard portez-vous sur la situation ukrainienne  ?

C’est un choc, vraiment. Comment, en 2022, la Russie peut-elle encore vouloir prendre des villes par la force, tuer des milliers de personnes … Ça me dépasse. Je condamne fermement cette guerre. Pour autant, je n’aurais pas arrêté de piger pour RT. Je suis correspondante à Barcelone, je ne traite donc que des sujets locaux. Mon travail avec ce média a toujours été neutre, le même qu’avec BFM ou RMC. Tant que je dis la vérité et respecte mon éthique journalistique, je ne vois pas pourquoi j’arrêterai. Je ne me suis jamais sentie payer par la Russie.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris la fermeture de Russia Today ?

Honnêtement, je n’y croyais pas, je ne comprenais pas. J’ai vraiment réalisé quand j’ai reçu des messages d’adieu des collaborateurs. Ma première réaction a été de me dire “de quels droits font-ils ça.” RT France a des correspondants dans des dizaines de pays, ça correspond à des centaines d’emplois. Fermer le média sans procès, sur le simple constat qu’il est russe, je ne l’accepte pas. Ce qui m’inquiète vraiment, c’est surtout le respect de la liberté d’expression. 

Attendiez-vous une mobilisation de la part des journalistes français ? 

Oui, j’attendais un mouvement de protestation. Pour l’instant, seul le SNJ (Syndicat National des Journalistes) s’est indigné, mais rien de la part des grands médias. Ce manque de soutien s’ajoute à la stigmatisation dont sont victimes les journalistes de RT, pris à part sur les réseaux sociaux. Je pensais qu’une majorité de la profession allait défendre la liberté d’expression, ça ne semble pas être le cas. 

Louis Bouchard