Cantines végétariennes : du papier à l’assiette

Depuis le 1er novembre 2019, les cantines scolaires françaises sont obligées de servir au minimum une fois par semaine un repas végétarien aux élèves : un repas sans viande ni poisson. Plusieurs semaines après l’annonce officielle, la vérité dans les assiettes n’est pas toujours celle attendue.

C’est dans le cadre de la loi Egalim : « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable » qu’intervient l’annonce des repas végétariens. Indicative plus qu’obligatoire, l’annonce est faite mais aucune mesure ne sera prise à l’encontre des cantines et des municipalités si elles ne parviennent pas à l’intégrer.

Carole Galissant, directrice du pôle culinaire et nutrition Sodexo écoles et universités, déclarait à l’AFP : « Sur le papier, c’est simple à mettre en place: couvrir les besoins nutritionnels, on sait faire, accompagner les enfants à manger ces nouveaux repas aussi ».
Mais au-delà des consignes dictées sur le papier, il est bien souvent complexe de faire consommer à certains enfants des légumes en plus grande quantité surtout si ces derniers n’entrent pas dans leurs habitudes alimentaires.
Confiant dans le savoir-faire des cantines, elle explique : « Pour qu’ils s’habituent à manger différemment, on ne commence pas par des recettes complexes, avec des produits qu’ils ne connaissent pas, comme une poêlée quinoa-brocolis. On va plutôt servir un parmentier, des lasagnes ou un couscous végétarien, dont l’enfant va reconnaître les ingrédients ».
Une mise en place progressive qui remet complètement à jour de nombreuses habitudes pour les cuisiniers scolaires. Le principal reproche ? Un manque d’accompagnement de l’Etat puisqu’aucun dispositif n’a été mis en place pour accompagner les municipalités.

Alimentation et précarité

Dans certaines municipalités, les parents d’élèves s’opposent complètement à cette nouvelle réglementation. De fait, pour certains foyers aux revenus les plus pauvres, la cantine est le seul moyen d’offrir aux enfants un repas équilibré dans la journée.
En chiffre, les repas de la cantine représenteraient un tiers des repas d’une semaine pour les élèves déjeunant à la cantine. Si l’alimentation au sein des familles prédomine, l’importance du déjeuner à la cantine n’est pas à négliger.

Le débat réside donc dans la subjectivité de l’équilibre alimentaire : ne vaut-il pas manger un repas végétarien et sain plutôt qu’un repas avec de la viande de mauvaise qualité ? C’est le débat qui anime aujourd’hui les cantines et les municipalités françaises.

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© Jacques Azam https://www.1jour1actu.com/info-animee/cantines-menu-vegetarien/

Pourquoi changer le menu ?

Face à ce changement annoncé, des questions se posent. Pourquoi déconstruire un système qui semblait jusqu’alors fonctionner ? Les enjeux sont nombreux.

Tout d’abord, la multiplicité des menus suivis par certains élèves entraîne un gâchis de plus en plus important dans les cantines. Convictions végétariennes et religions sont sources de plus en plus de contrariétés dans les restaurants scolaires, un malaise que le menu végétarien semblerait pouvoir partiellement corriger.

La question environnementale est également à prendre en compte. De plus en plus, les élèves sont sensibilisés aux questions écologiques et environnementales : la consommation excessive de viande en fait éminemment partie.

Dernier point, les enjeux pécuniaires. Contrairement aux aprioris, le repas végétarien coûterait moins cher qu’un repas classique aux cantines. Pour cause, c’est la viande qui coûte cher. Le menu végétarien pourra donc à l’avenir, baisser le coût moyen du ticket de cantine.

Alors qu’est ce qu’on mange ? Pas de crainte à avoir concernant l’aspect nutritionnel, les repas continuent d’être élaborés par des équipes professionnelles de diététiciens.

Lille, « cantine verte »


À Lille en 2014, les cantines proposaient déjà un repas végétarien chaque semaine aux élèves de la métropole lilloise. Depuis 2018, la mairie « a voulu aller plus loin en proposant deux repas végétariens par semaine » aux 8 000 écoliers lillois. Une décision qui intervenait suite à des arguments médicaux (lutte contre le surpoids et l’obésité) ainsi qu’environnementaux.
Cette innovation aura d’ailleurs valu à la ville le titre de « cantine verte » par l’association Greenpeace, une première pour une commune française.

Manon Serenne